Je crois avoir compté jusqu'ici cinq phares dans les photos de cette rubrique (jeu concours, en donner la liste ; cadeau prime à déterminer pour féliciter les gagnants). Il y en a pas mal d'autres dans ma photothèque, vu que c'est une de mes nombreuses marottes. Cette série, dont la longueur est nettement moins prédéterminée que celle de mes précédentes séries, leur sera consacrée, ainsi qu'aux bouées, balises, amers et autres aides à la navigation.
Un petit mot d'historien pour commencer : les phares et les balises sont l'un des versants de la révolution de la navigation aux débuts de l'époque contemporaine - l'autre versant étant l'hydrographie et sa production de documents nautiques, cartes et instructions nautiques. L'enjeu : rendre possible la navigation dans une région qu'on ne connait pas, ou qu'on connait mal. Jusque là, pas d'autre moyen que de prendre à son bord un « pratique local » : quelqu'un qui connait par cœur tous les cailloux de la côte qu'on longe, qui est capable de s'y repérer même avec une visibilité minimale et qui vous indiquera la route la plus sûre pour parvenir à bon port.
Évidemment, ça ne facilite pas les échanges, et ça devient peu viable dès lors que la navigation s'intensifie et s'internationalise... Alors à partir de la fin du XVIIIe siècle commence le double processus du levé de cartes* et de construction d'aide à la navigation, celles-ci permettant de figurer sa position sur celles-là. Une domestication du monde, rien moins.
Il ne suffit pas de repérer dans la nuit la lumière d'un phare, il faut aussi savoir lequel c'est. C'est pourquoi chaque phare a un rythme lumineux qui lui est propre. Cette caractéristique est indiquée sur les cartes marines ainsi que dans des ouvrages spécialisés, les livres des feux.
C'est évidemment dans les endroits qui combinent dangers et trafic maritime intense qu'on trouve le plus de phares. La pointe de la Bretagne en est donc particulièrement bien pourvu. &Acute; tout seigneur tout honneur : je commencerai donc par un des phares les plus battus par les tempêtes, un de ces « enfers » des gardiens de phares d'autrefois :
La Jument, 48°25,4 N - 5°08,1 W, fl(3)R 15s, H36 P22
C'est à dire trois éclats rouges dans une période de 15 secondes depuis un foyer situé à 36m au dessus des hautes mers et visible à 22 milles nautiques pour un observateur situé au niveau de la mer. Si les conditions le permettent bien sûr. De jour et par beau temps, avec les pieds bien posés sur le plancher des vaches, ça n'est pas franchement une aide à la navigation : de toute façon, à marcher dans cette direction, on arrivera rapidement au bout de la pointe sud-ouest de l'île d'Ouessant. Mais un monument, par contre, c'en est un, sans le moindre doute.
Le Plume vous salue bien.
* à lire à ce sujet : Olivier Chapuis, À la mer comme au ciel, Beautemps-Beaupré & la naissance de l'hydrographie moderne (1700-1850), Paris, Presses de l'université de Paris-Sorbonne, 1999.
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