12 août 2009

D'autres choses qui restent, à Budapest

Il y a des bâtiments rigolos à Budapest, d'autres splendides, d'autres curieux ; il y en a quelques uns de sinistres, pour qui connait un peu l'histoire. L'un d'eux serait plutôt pimpant, avec ses céramiques multicolores et ses tours à coupoles, un mélange de grande mosquée d'Ispahan et de duomo italien : la grande synagogue de Pest.


La grande synagogue de Pest, Dohány utca, Budapest, 30 juillet 2009.

Pourquoi sinistre ? Parce qu'elle est grande, très grande : la plus grande d'Europe, dans un pays où la communauté juive n'est plus que le pâle reflet de ce qu'elle était alors.

L'élimination des Juifs de Hongrie est un des épisodes les plus hallucinants de la deuxième guerre mondiale, par sa terrifiante efficacité (moins de deux mois, plus de 400.000 victimes), mais aussi par son caractère tardif : mai 1944, alors que l'Axe est sur la reculade partout, que l'ouverture d'un nouveau front à l'Ouest est imminente, que le front italien se crève, que les batailles font rage en Ukraine et Biélorussie. Alors que l'Armée rouge s'approche, on fait le choix de donner, sous la direction de Eichmann, la priorité à l'extermination sur les opérations militaires.

La déportation est interrompue en juillet 1944, peut-être à la demande du gouvernement collaborationniste hongrois réagissant aux pressions internationales (c'est l'une des rares phases de la Shoah qui a été immédiatement connue dans le monde entier), peut-être aussi parce que les front de l'Est et de l'Ouest venaient de crever pour de bon.

Il y a eu moins de mort parmi les Juifs de Budapest que dans le reste du pays, leur déportation ayant été prévue pour le mois de juillet 1944. Mais cependant, par sa taille, sa monumentalité, son emplacement, cette synagogue est en elle-même la trace de ce qu'était la communauté juive de Hongrie, et qu'elle n'est plus.

Le Plume vous salue bien.

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