21 janvier 2006

Chemin de fer

Allez, un p'tit coup de gnôle pour fêter le week-end ?


Un wagon-foudre du début du XXème siècle, Paris, Champs-Élysées, juillet 2002.

Parcouru l'autre jour la thèse de Peter J. Wexler, publiée en 1955, sur la formation du vocabulaire français des chemins de fer, de la fin du XVIIIème au milieu du XIXème. Il s'avère que, comme je le soupçonnais, le terme de chemin de fer lui-même n'a été accepté que progressivement et avec réticence. On emploie bien le terme de « chemin ferré » à propos de la fabrique de canons d'Indret, près de Nantes, à la fin du XVIIIème siècle :il s'agit semble-t-il de la première voie ferrée au sens moderne du terme a avoir été construite en France. Elle permettait de mener les canons de la fonderie, où ils étaient coulés, à la forerie, où on évidait l'intérieur pour en faire, ma foi, des canons.

Mais le terme semble impropre : ce n'est pas tout le chemin qui est de fer, mais seulement deux bandes de roulement... On propose alors « ornières ferrées, » à l'image des ornières de bois que l'on utilisait depuis longtemps dans les mines pour faciliter le roulage des wagonnets, mais des ornières, c'est en creux, alors que les rails ne le sont pas vraiment. Un traducteur propose, en 1803, le terme de grille-voie :

« Le mot primitif anglais, est composé de deux mots rail et way dont le premier signifie grille, la seconde voie. Cette expression m?a parue préférable à celle de chemin ferré. On aurait pu aussi bien adopter le mot rail-way comme le premier nom d'une chose nouvelle. »

(note en marge de la traduction d'un rapport sur le chemin de fer de la compagnie du Surrey, établie pour un conseiller d'État à Cologne, 1803, cité par Wexler, p.26.)

Et à vrai dire, si grille-voie n'a pas rencontré un grand succès malgré son exactitude linguistique, rail-way est longtemps resté dans les esprits - on le voit ressurgir à la fin du XIXème siècle pour désigner ce qu'on nomme aujourd'hui tramway.

Parallèlement, les matériaux utilisés ont évolués, ainsi que leurs appellations ;  début XIXème siècle, le terme de fonte de fer remplace celui de fer coulé. Le chemin de fer (coulé) devient donc le chemin de fonte  (de fer). Mais la fonte, trop cassante, est remplacée par du fer puddlé, forgé au laminoir : c'est le chemin de fer forgé, que l'on simplifie en chemin de fer. Le terme se stabilise, malgré le remplacement du fer par l'acier à partir des années 1860. Pourquoi « chemin de fer » en est venu à désigner le sytème de transport dans son ensemble, pendant que « voies ferrées » désignait le support, je n'en sais rien - peut-être parce que je n'ai pas lu cette thèse en entier.

Au fait, je vous avais déja dit que je m'intéressais aux trains ?

Le Plume vous salue bien.

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