03 août 2005

km2267 : Ronchamp (Haute-Saône)

Pour en finir avec le voyage en Italie, il me semble judicieux de revenir en France, justement. Rappelez-vous la fin du grand blond avec une chaussure jaune : « Quand il reviendra - car il reviendra forcément... »

C'était je crois la première fois que je mettais mon nez dans ce département rural de l'Est de la France. Je suis un Français de l'Ouest : déposez-moi n'importe où à l'ouest d'un angle Dieppe - Paris - Bordeaux et je me sentirai un peu chez moi, si je n'y ai pas effectivement habité. De l'autre côté de cette ligne, il y a plein de coins sympas, mais ça me reste un peu étranger. Bref, la Franche-Comté, c'est une région dont je présume qu'elle doit avoir de nombreux agréments, mais c'est vraiment l'inconnu, sans compter que c'est un peu trop loin de la mer pour moi.

Avisés que nous sommes, nous voulions éviter de prendre l'autoroute qui redescend vers Beaune et avions donc pris la nationale (elle l'est encore, pour le moment) de Belfort à Langres. Et comme je copilotais sur ce tronçon je suis tombé en regardant la carte sur le village de Ronchamp, d'où le tilt : c'est là qu'est la chapelle Notre-Dame-du-Haut, œuvre majeure du Corbusier. Les photos que j'en avais vues ne m'avaient jamais entièrement convaincu. Mais, tout de même, pour un ou deux kilomètres, ce serait dommage de ne pas vérifier sur pièces.

On quite donc la nationale à la sortie du gros village de Ronchamp ; on passe sous la voie ferrée Paris-Bâle, dont la proximité n'est pas une surprise lorsque de Bâle on roule vers Paris. On serpente dans les bois à flanc de côte ; on passe une petite mine de charbon transformée en musée, avec sa petite rame de wagons Decauville en expo ; on arrive à un parking surdimensionné et, après avoir acquitté une modique entrée, on termine de monter à pied. Et voilà : on se retrouve sur le cul. C'est vraiment magnifique - ce n'est pas parce qu'en copiant ce modèle on a fait des dizaines d'églises au mieux médiocres (et au pire celle de Royan) que celle-ci doit être mise dans le même sac. C'est un des lieux où le Corbusier a fait jouer avec le plus de virtuosité ses principes de base : l'adéquation avec le milieu, le jeu sur la grammaire spatiale des édifices traditionnels et, surtout, la lumière. Il s'agit d'une œuvre tardive (années 50), à une époque où la question de la lumière est la seule qui le préoccupe vraiment. L'architecture comme jeu des volumes sous une lumière changeante...


La chapelle Notre-Dame-du-Haut à Ronchamp, 13 juillet 2005.

Ce toit par exemple, qu'on a mal imité un peu partout dans les années 60 : il n'a d'intérêt que par le fait que, dans l'orientation précise qui est la sienne, il est secondé par l'ombre qu'il projette sur la courbe de la façade sud. Faites pivoter l'ensemble de 90° et ça n'est plus qu'une masse de béton sans le moindre intérêt. L'intérieur est tout aussi magistral, reprenant tous les termes de l'architecture religieuse occidentale mais en produisant un espace totalement neuf et parfaitement harmonieux. Et là encore, c'est la lumière qui est le personnage principal. Une très, très belle leçon d'architecture - aux antipodes de ces bâtiments formidables sur plans ou en maquette et qui, une fois sortis de terre, tombent complètement à plat. Et les bois et coteaux de Franche-Comté sont là, en face du tertre, étendant l'harmonie bien au delà des murs.

Bref : on a plutôt aimé.

Le Plume vous salue bien.

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