En l'an 1778, Dom Coup-de-Lance, abbé cistercien de Grosbot, assigne en justice les entrepreneurs de la fonderie de Ruelle : il leur reproche d'avoir fait établir, en amont d'étangs appartenant à l'abbaye, des lavoirs à mines, c'est à dire à minerai de fer. Ces lavoirs, dit-il, menacent d'« anéantir » lesdits étangs ainsi que les moulins qui les accompagnent. J'ignore les détails de cette affaire, n'ayant pas pour le moment retrouvé les pièces de la procédure - pas sûr d'ailleurs que je les retrouve jamais, les archives juridiques du XVIIIème siècle étant parfois un grand mystère.
Les textes me permettent toutefois de situer avec une bonne précision les lieux concernés ; après avoir conduit Madame Plume à son train, je suis donc allé y mouiller mes chaussures. Je pense avoir localisé un des étangs dont parle l'abbé, un étang artificiel (comme presque tous les étangs de France d'ailleurs) d'environ 200m de long, alimenté entre autre par une petite source, mais sans doute aussi, en période de hautes eaux, par un petit ruisseau venu du nord-ouest. L'étang était solidement pris par la glace, même si je ne me suis pas aventuré à mettre cette solidité à l'épreuve de mon poids. Le soleil commençait déjà à descendre derrière les arbres des collines environnantes ; en dehors du bruit de l'eau, pas un bruit.
L'étang de Font Palet, Grassac, Charente, cet après-midi, 16h36.
Mes tentatives pour retrouver, en amont, l'implantation des lavoirs à mines n'ont rien données - au demeurant, je ne tenais pas à me perdre dans les bois à la nuit tombée. Toutefois, un petit coup d'?il en aval me montre, sur les bords de l'émissaire de l'étang, d'épaisses couches de boues rouges qui me semblent compatibles avec celles produites par ce genre d'installations. Nulle doute que ce sont ces boues qui causaient la fureur de Dom Coup-de-Lance (je ne me lasse pas de ce nom), peu compatibles à n'en pas douter avec le bien-être des carpes abbatiales...
Le Plume vous salue bien.
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