21 novembre 2005

Monts d'Arrée

Quand j'étais à l'école primaire, j'ai appris comme il se doit les points culminants de la France et des cinq continents, mais aussi celui de la Bretagne - j'étais il est vrai élève de l'école publique Joseph Morand à Lannion (Côtes-du-Nord). On m'apprit donc que le point culminant de la Bretagne se trouvait au mont Saint-Michel-de-Brasparts, dans les monts d'Arrée. La vérité scientifique m'oblige à préciser que c'est inexact : les deux points culminants de la Bretagne sont, ex-aequo, Tuchenn Gador et Roc Trevezel, le premier à mille cinq cents mètres de là, le second à quatre ou cinq kilomètres. Tous deux, du haut de leurs 384 mètres d'altitude, dominent largement les 382m du mont Saint-Michel-de-Brasparts. J'admets : on n'est pas dans le domaine des neiges éternelles, des cordes et des piolets...

Pour rejoindre le sommet, en fait, il suffit d'aller au bout d'une petite route qui mène à la chapelle Saint-Michel, sans doute construite là pour donner un lustre nouveau à un lieu de culte bien antérieur - après tout, c'est aussi le cas de l'église Saint-Gervais Saint-Protais, dans le quatrième arrondissement de Paris. En haut, le vent, un paysage sévère ; en bas, le réservoir Saint-Michel, au bord duquel fut construite la centrale nucléaire de Brennilis.


Vue vers l'est depuis le mont Saint-Michel-de-Brasparts. Saint-Rivoal, Finistère, juillet 2000.

Si l'on trouve saugrenu d'avoir installé une centrale dans un lieu aussi sauvage, je ferais remarquer qu'à quelques kilomètres de là se trouvaient, il n'ya guère que deux siècles, les mines de plomb argentifère les plus modernes et les plus importantes de France : le Huelgoat et Poullaouen. C'est même là que fut installée la première machine à vapeur de France, pour aider à l'épuisement des galleries de mine - pour une raison qui dépasse mon entendement, elles subissaient d'importantes infiltrations d'eau.

Évidemment, aujourd'hui, le Huelgoat préfère vanter ses chaos granitiques (« camp d'Artus, » etc.), effectivement magnifiques, que son passé industriel. Le touriste n'a pas besoin de savoir que le ruisseau d'Argent doit son nom à une industrie des plus polluantes, plutôt qu'aux reflets du soleil sur l'onde, et que le plan d'eau au bord duquel se trouve le camping municipal fut établi comme source d'énergie pour les ateliers métallurgiques... Au demeurant, peut-être pourrait-on faire un lien entre la pollution due à ces ateliers et le déclin de la population dans ce bassin au XIXème siècle. Il faudrait que je pose la question à ma directrice, qui est spécialiste de l'histoire de ces mines.

Là où je veux en venir, c'est que, dans nos contrées, il n'y a pas de paysage qui ne soit avant tout un paysage humain. Ça mérite d'être rappelé, je crois.

Le Plume vous salue bien.

Aucun commentaire: