Alors que les électeurs américains font la queue pour voter, le suspens n'est pas vraiment à son comble : les chances de John McCain sont extrêmement faibles (1,1% d'après fivethirtyeight.com). Sauf bien sûr si tous les sondages se trompent dans le même sens, ce qui parait improbable.
Il y a bien la théorie de l'effet Bradley, du nom d'un candidat noir au poste de gouverneur de Californie en 1982, battu alors qu'il menait dans (certains) sondages : on a prêté ce décalage à la réticence des électeurs blancs à déclarer voter pour un noir. Un excellent article paru sur politico.com démonte cette lecture du scrutin de 1982 : cette défaite s'expliquait politiquement, sans avoir à invoquer le crypto-racisme de l'électeur. On peut noter que les trois erreurs de Bradley mentionnées par l'article correspondent à trois axes de travail majeurs de la campagne d'Obama ; ce n'est pas un hasard.
Pour ceux qui ont le courage (moi, ça m'étonnerai), les premiers résultats significatifs devraient arriver vers deux heures du matin. En particulier, si la Virginie (qui finit de voter à 1h, heure de Paris) est clairement du côté d'Obama, pas la peine de chercher, les carottes sont cuites pour McCain. D'ici là : tous les modèles tendent à montrer qu'un taux de participation élevé est favorable à Obama ; tous les records semblent en passe d'être battus
Les arrières du Capitole, côté Union Station. Washington (D.C.), décembre 2005.
Pour les acros, l'autre sujet à regarder, c'est du côté du Capitole : le résultat des élections au Congrès. On s'attend à une forte progression des démocrates dans les deux chambres, mais reste à savoir de combien. c'est particulièrement sensible au sénat, où une super-majorité de 60 leur permettrait d'avoir les mains libres, notamment en matière de nominations judiciaires... C'est cependant peu probable ; 57 ou 58 sièges est l'évaluation la plus fréquente.
Et jeudi, autre vote, bien français celui-là : le vote des militants socialistes sur les motions proposées au congrès de Reims. J'en reparlerai.
Le Plume vous salue bien.
[boîtier Pentax MZ-10]
P.S., 5 novembre, vers midi : voilà qui est fait, donc. On n'a pas encore les résultats définitifs, la Caroline du Nord et le Missouri ayant des résultats très serrés (probablement MO pour McCain, NC pour Obama, mais on verra), idem pour la deuxième circonscription du Nebraska (qui comme je le disais l'autre jour affecte ses grands électeurs en fonction des circonscriptions législatives). Il semble par ailleurs que la Géorgie ait un petit peu oublié de compter une bonne partie des votes anticipés ; les jeux n'y sont donc pas encore faits. Ceci dit, la victoire d'Obama est assurée, puisqu'il gagne au moins huit États de plus que John Kerry en 2004 : les deux États-clés de l'Ohio et de la Floride ; l'Indiana et l'Iowa dans le Middle-West ; la Virginie et sans doute la Caroline du Nord dans le Sud-Est ; le Colorado, le Nouveau-Mexique et le Nevada dans l'Ouest.
L'élection d'un homme de couleur à la Maison blanche a sans aucun doute une portée symbolique importante mais il me semble qu'en ce qui nous concerne, nous autres reste du monde, il est beaucoup plus importantd'avoir de nouveau à ce poste un individu d'une intelligence supérieure - ce n'était clairement pas le cas de son prédécesseur, ni sans doute de son concurrent. Ajoutons que la campagne d'Obama a prouvé qu'il savait remarquablement bien s'entourer, ce qui n'est pas rien.
Côté sénat, la majorité démocrate est renforcée, mais n'atteindra probablement pas le seuil des soixante : dans le Minnesota et l'Oregon, les résultats sont trop serrés pour donner un vainqueur, mais les candidats républicains ont une légère avance (le sénateur républicain sortant de l'Oregon avait vanté tout au long de la campagne sa proximité avec Obama !) ; en Géorgie, compte tenu du problème mentionné plus haut, il y aura sans doute un ballottage favorable pour le républicain sortant (la Géorgie, comme la Louisiane, prévoient un second tour pour la plupart des scrutins si un candidat n'obtient pas la majorité absolue) ; en Alaska, Ted Stevens, condamné la semaine dernière pour corruption, pourrait être réélu à la surprise générale.
À la chambre des représentants, qui est intégralement soumise à réélection tous les deux ans, même tendance : renforcement de la majorité démocrate, mais sans raz-de-marée. Peu de sortants démocrates battus, sauf cas marginaux. Une progression plus forte des démocrates dans cette assemblée aurait de toute façon bénéficié à la présidente de la chambre, Nancy Pelosi, ce qui n'aurait pas forcément fait les affaires du futur président...
En tout cas, et comme je l'avais dit dans le message initial, le racisme supposé de l'Américain moyen n'a guère pesé dans cette élection. Nos bon vieux stéréotypes franchouillards vont avoir besoin d'une sérieuse révision...
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